Jamais deux sans trois ! Ou l'application de la loi de Murphy pendant les vacances.
Je ne sais pas si cette expérience servira d’étude de cas. Mais elle mérite que je vous la raconte, histoire que
l’on s’marre un peu !
En règle générale partir en vacances provoque une vague de gaieté et d’enthousiasme où les
rabat-joie et autres fouteurs de trouble ne sont pas priés d’aller surfer. En ce petit matin d’avril, malgré un
bon timing, je pars en catastrophe pour la gare de Lille Flandres. La vibration de ma valise sur les pavés me meurtrit
le bras : c'est ça l'enfer du Nord ! Peu chargée, elle manque de stabilité et dans ma course effrénée, elle se couche dans mes jambes. De quoi
perturber mon calme légendaire (sic). Mais à quoi bon !
Se presser, courir, s’exciter pour ne pas rater son train
de 08:17 pour le soleil du Maroc. Pourquoi s’évertuer à être ponctuel quand on peut compter sur la SNCF ? Quand
j’arrive à 08:10 et que je composte mon billet, l’activité sur les quais parait bien tranquille. C’est que le
panneau central annonce déjà un retard de 10 minutes qui sera rapidement augmenté de 20 minutes supplémentaires.
" C’est à nous de vous faire préférer le train ". Mais les cheminots ne sont pas matinaux le samedi quand je pars en
vacances. Finalement le TGV s’installe à quai. Partons du postulat qu’un problème n’arrive jamais seul : d’abord,
remonter tout le quai pour comprendre rapidement qu’il n’y aura pas de wagon portant le même numéro que mon billet.
Ensuite, il y a cette voix féminine si émouvante qui t’annonce que " suite à un problème technique le départ de
notre TGV est différé.". D’où l’importance d’un bon pied de pilote. Mais quand à 09:08, une voix excitée
lance " Attention voie 8. TGV pour Paris départ imminent !!! ", je m’attends à ce que, les mains accrochées aux accoudoirs,
que le train s’ébranle, s’arrache avec violence et énergie ! Je plaisante ... Encore 2 bonnes minutes de préchauffage.
J’arrive à Paris sain et sauf. Sur le quai, le personnel de la SNCF est venu en nombre pour distribuer les enveloppes
pour le remboursement du billet. Je fonce pour acheter mon ticket d’Orlyval. A 11:15, je sors de la rame et me dirige
vers les escalators. De mon escalier mécanique j’aperçois déjà les écrans et une petite ligne qui clignote. A quoi bon !
Franchement, pourquoi la SNCF devrait s’amuser à faire partir ses trains à l’heure pour que je puisse choper mon avion
quand elle peut compter sur Jet4U ? Oui, un jet pour toi l’ami ! Surprise, ton vol prévu à 13:20 décollera
à 17:10. Mais en compensation, la compagnie t'offre un repas.
Elle n’est pas belle la vie ? Cette situation ubuesque me donne la banane. J’assiste à une belle scène de comédie humaine
avec une femme aux grands airs qui vocifère dans son téléphone à son interlocuteur " de lui passer immédiatement le
directeur de la compagnie " en accompagnant ses cris et gestes de quelques noms d’oiseaux pour qualifier cet individu
dont elle affirme devant témoins qu'elle ne fréquentera plus les avions. Evidemment, j’ai laissé mon téléphone
portable à Lille et je dois trouver une borne Internet pour prévenir mon pote a Casa' que je ne risque pas d’arriver pour le déjeuner mais pour
le dîner ! Quand vers 17:30, le zinc commence à rouler sur le
tarmac, l’hôtesse s’excuse pour le retard occasionné et nous informe que nous avons été retardé de 30 minutes par une
grève "éclair" et instantanée des bagagistes (rires). Sacré Murphy ! Let’s go !
Murphy en image !
Casa la blanche
Quand j’arrive à Casablanca, la journée touche déjà à sa fin. Le soleil flirte avec l’horizon. Pour mon premier jour
sur la terre marocaine, je suis accueilli par mon ami Otmane. Je suis étonné par ce pays en pleine mutation : création
de zones off-shore pour le traitement du back-office de sociétés internationales, l’ouverture des ondes
radio où je suis agréablement surpris d’entendre les Pixies ! Mais la récente histoire d’usurpation d’identité du frère
de roi sur Facebook prouve que le pays n’a pas encore franchi le pas pour être considéré comme fun & cool.
It’s a long way if you wanna be rock’n’roll.
Ce voyage tumultueux m’a assoiffé. Nous allons déguster une Casablanca. Une bière locale très agréable, avant de visiter la fierté du peuple marocain : la mosquée
Hassan II. Une construction, autant magnifique que surdimensionnée, qui fusionne tout le savoir faire de
l’artisanat national avec le béton de Bouygues. Une mosquée érigée sur la mer qui aujourd’hui s’affaisse et souffre
des embruns. Un monument que les marocains ont chèrement payé, autant en vie qu’en Dirham, pour réaliser le rêve
mégalomane d’un roi parmi d’autres. Cette balade au grand air nous a ouvert l’appétit. Mon guide m’invite à
La Fibule, un superbe restaurant typique de la gastronomie marocaine. Proche du phare, il offre une vue
panoramique sur l’océan. Sur ses conseils, je déguste un tajine de Kabab Maghdour aux oeufs que nous accompagnons
d’une bouteille de Médaillon. Pour le dessert je me laisse séduire par une pastilla au lait et aux amandes.
Repas qui s’achève par l’incontournable thé à la menthe et quelques pâtisseries.
L'heure de la prière
Mosquée Hassan II à Casablanca
Slow train coming
C’est avec le concours de l’ONCF que je dois rejoindre Marrakech.
J’apprécie beaucoup les voyages en train car ils permettent justement de se laisser transporter. Repos du corps et
quiétude de l’âme. Je deviens le spectateur privilégié d’un voyage en cinémascope. Les paysages défilent lentement
par la fenêtre encrassée et vieillie. Lorsque je ne traverse pas des "bleds" où prédomine le grand courant
d’anarchitecture, ce sont de grandes étendues agricoles où le travail doit être assez semblable à celui que
les agriculteurs français ont connu au début du XXème siècle. En effet, beaucoup de femmes et d’enfants réalisent
des tâches manuelles et des équidés omniprésents sont employés comme bêtes de somme. J’ai bien aperçu un tracteur, d’un modèle
désuet, usé par le temps. Usé ! Comme les voitures des chemins de fer marocains. La visite de leur site web m’avait
pourtant donné une assez bonne impression de la qualité des moyens de transport. Les photos sur leur site doivent
probablement représenter l’objectif à atteindre. Les voitures ressemblent à s’y tromper à la série des "corail" de
la première génération. L’ensemble a mal vieilli. Porte cassée ou bien manquante. Quand aux WC, ils m’offrent un
spectacle répugnant et putride de quoi soulever le coeur et retourner l’estomac d’une âme sensible. Autant se retenir !
Inutile d’en rajouter une couche ...
Direction Marrakech
Crosstown Traffic
Dar Ganou. Sur le coup, le nom sonne breton. Pourtant, pas de confusion possible, ce n’est pas en pays brezou que
je viens de poser mes valises, mais dans un sympathique ryad marocain. En plein coeur de la médina, à deux minutes de la
place Djemaa El Fna, la quiétude de ce lieu représente un havre de paix comparé au tumulte de l’agitation citadine
si proche. En effet, dès que nous approchons de la médina, l’agitation de la fourmilière va crescendo. Nous ne sommes
qu’une fourmi supplémentaire dans l’apparente désorganisation du flux humain, mécanique et sonore. J’ai l’intime conviction
que cette construction fragile risque de basculer d’un moment à l’autre, que l’accident est inévitable. Camions, bus, âne
tirant des charrettes surchargées, cyclistes, voitures s’imposant dans le trafic, cris, klaxons et piétons glissant comme
du sable entre les doigts dans les interstices de ce réseau. Sans oublier les mobylettes « Royal Circus » déboulant du
néant : un étonnant exercice d’équilibre et de composition sans casque qui consiste à transporter le plus d’individus ou
d’objets divers possibles, et ce à plein gaz. Tous les acteurs de ce système complexe évoluent dans ce maelström affolant
à la limite du « sans-jamais ».
Evidemment, parvenir à la sérénité de ce lieu est un superbe réconfort. Je suis accueilli chaleureusement par Véronique et
Jean-Marc, un couple de français qui ont tout largué pour tenter l’aventure d’une nouvelle vie plus proche du soleil et
bien loin du stress quotidien. Après une bière salvatrice, je découvre ce lieu magique. Fraicheur, murs blancs fleuris,
piaillements d’oiseaux, petite piscine, chambre confortable et richement décorée, le contact avec ces éléments m’indique
clairement que je vais pouvoir recharger mes batteries et continuer paisiblement ma lecture de Gonzo Highway,
la correspondance de Hunter S. Thompson.
Crosstown Traffic in Marrakech
Si jamais vous aviez l'intention de passer quelques jours à Marrakech, je vous conseille vivement ce Ryad.