Quatorze années se sont écoulées depuis Fuzz You, le premier EP de Poncharello sorti en 2006. Nos prophètes du Rock Supersonic malgré la pandemie sont toujours en forme et reviennent avec un nouveau disque qui s’intitule Four Wheel Overdrive. Un titre symbolique autour du chiffre 4 : quatre musiciens, quatrième opus. La combinaison idéale pour un 4 roues motrices qui roule à la saturation et la distorsion. Etes-vous prêts à tailler la route ? Allez en bagnole Simone et accroche ta ceinture !
Le disque s’ouvre sur « Four Wheel Overdrive », ce titre instrumental donne son nom à l’album. Ce morceau c’est comme l’apéro : convivial, chaleureux et ça met en appétit ! L’ouverture des hostilités se fait par un vrai passage à tabac. La batterie, martèle les coups et donne le tempo, soutenue par la basse de Mr. Poule puis viennent les guitares avec leur gimmicks entêtants, quelques ghost notes qui scient les micros et du vibrato pour nous faire trembler les poils. En une minute douze, Poncharello plante le décor avec un instrumental efficace parfaitement taillé pour ouvrir un concert. Ladies & Gentlemen this is The Supersoniiiiiiiiic Poncharello. Mon impression n’était point foireuse puisque Bob Swann le chanteur et guitariste me confirmait mon hypothèse en rajoutant que l’introduction instrumentale est en général suivie de « Do it Yourself » ou bien « Six Seconds » des morceaux, de l’album 220 kV, au même tempo que « Four Wheel Overdrive ». Sur « Question Mark », Poncharello tente d’imaginer les tourments dans l’esprit d’un môme qui va commettre une fusillade. Ces sensations étranges d’insectes sous la peau ou bien de requins qui nagent dans le cerveau pour finalement prendre les armes car « it takes bullet or two just to put the record straight ». Un titre inspiré par Seung-Hui Cho, un Américain d’origine sud-coréenne responsable de la fusillade de Virginie tech en 2007. Un élève coincé dans un mutisme qui se faisait appeler « Question Mark » après avoir laissé un point d’interrogation en face de son nom sur une de ses copies. Les plus fidèles fans de Poncharello se demanderont surement à l’écoute de « Around » s’ils n’ont pas déjà entendu ce morceau. En effet, il figure sur Fuzz You, leur premier opus. En 2012, les musiciens ont été sélectionnés pour le Tour de chauffe qui propose un accompagnement des groupes pour la scène. Cette nouvelle mouture de « Around » résulte de ces séances de travail lors de leur résidence au Nautilys. La cymbale marque le tempo pour annoncer le gimmick entêtant de « Pop ». Une chanson composée par Bob dans les années 90 alors qu’il jouait encore avec le Pambanizza Cirkus. Il me confiait d’ailleurs à ce sujet que Poncharello avait joué ce morceau lors de leur tout premier concert. Mais il n’avait jamais été rejoué ni concrétisé car c’est un morceau très aéré qui demande d’être très précis. Et la précision comme l’expertise s’acquière avec le temps. « Pop » a été dépoussiéré et sorti de son carton pour être travaillé et figurer sur ce dernier opus. Un morceau qu’il aurait été dommage de laisser dormir plus longtemps puisqu’il traite de l’industrie de la musique. Oui l’industrie avec ses retours sur investissement, Bankable et autres termes sympathiques. Lorsqu’il s’agit de vendre la musique comme une marchandise tout est permis surtout de s’approprier le travail créatif des musiciens quitte à en ôter l’ADN, l’aseptiser pour que cela colle à la demande du marché, devenir commercial ! Après avoir vendu son âme à la Major ou au label masqué indé ce sera la chute. « Today you’re shining Tomorrow Damned » et « we won’t be here no more to pay the band ». Arrive le morceau en puissance, taillé pour vous donner la banane, bien branlé avec ses couplets, pré refrains, refrains et petit pont, grand pont pour solo efficace, une mélodie pour vous accompagner toute la journée avec son « Give it back now » qui donne son titre à cette chanson. Pourtant elle est teintée de nostalgie et de rancœur. En effet, elle traite des relations néfastes et perverses que l’on peut vivre que ce soit en amour ou en amitié. Lorsque la rupture est consommée, l’on se rends compte que tout ce que l’on a donné et investi pour alimenter, construire et solidifier cette relation était vain et que nous avons été dupé : « Don’t know just what the Hell we were but what I once knew be wrong. » Nous aimerions récupérer tout cela « All I gave and You receive – Give it Back now ». La certitude, c’est que la période de deuil sera longue et douloureuse « You made a perfect mess of me » et que la confiance laisse la place à la méfiance et aux craintes « What I learnt from you my friend trust noone like that again ». Une chanson qui résonne avec un timbre particulier dans mon for intérieur grâce à la pertinence et réalité du texte. Comme dirait l’autre « C’est du vécu ». Pour « Master » nous sommes en compagnie de la mort. Il s’agit ici d’une réflexion sur son acceptation. En effet, nous sommes des êtres mortels. Souvient-t ’en ! « Every step could be the last » et la mort est là. Elle rode « It’s there behind you – and it darkens every day ». « Master » est construit sur un modèle identique que « Four Wheel Overdrive » avec son introduction batterie/basse – que l’on retrouve également sur le pont – mais avec un rythme plus lent qui apporte plus de pesanteur à l’ensemble. Le chant accompagne parfaitement le tempo avec les guitares stridulantes pour donner du relief. Le soir de l’écoute du mix de l’album dans un auditorium, les musiciens de Poncharello ont eu l’idée de demander à Marc Bour, musicien et arrangeur talentueux qu’ils ont connaissent depuis plusieurs années, de clôturer l’album avec une composition de son cru en lui laissant carte blanche. En effet, Marc a joué dans Costa Gravos, un groupe lillois aux influences multiples essentiellement composé d’un peu de Métal et de beaucoup de déconnade. Il avait également rejoint Pambanizza Cirkus pour renforcer les cuivres sur quelques dates. C’est dire s’ils se connaissent ! Marc accepte et compose en une soirée cet étonnant « 88 Key Overdrive » sorte de maelstrom sonore qui mélange des bribes de mélodies de tous les morceaux dans une interprétation très personnelle, entre classique déjanté et ragtime, jouée dans un cabaret berlinois.
Poncharello confirme, une fois de plus, sa stature de groupe qui tient la scène avec des morceaux bien composés. Quelque soit la nature du terrain, ce Four Wheel Overdrive avance et se joue des difficultés. Vivement que nous puissions vérifier en live cette énergie et générosité.
Vincent GILOT aka Le Guise
9 juin 2021