A Farewell to Dawn

2016

http://www.7weeks.fr

01. King in the Mud
02. The Ghost Beside Me
03. Ohka
04. Kamikazes
05. Broken Voices
06. A Farewell to Dawn
07. January
08. A Well Kept Secret
09. Knots

Le chant de coq m’avait déjà sorti de ma torpeur. Doucement, je quitte la chaleur réconfortante de la couette pour rejoindre Laurent avec du café chaud. La nuit enveloppe encore de son drap noir les bâtiments de la ferme et les arbres dont les cimes se dressent vers les étoiles. Mes bottes s’enfoncent doucement dans l’épaisse moquette des herbes encore humides de rosée. Un sourire barbu, accueille les cafés avec un regard bienveillant, qui signifie que c’est l’heure d’une pause bien méritée lorsque l’on est à la fraîche depuis une bonne heure. Quelle bonne idée ! C’est gentil d’y avoir pensé. Quelques piaillements accompagnent le changement de lueur du Levant. Les contours des arbres se dessinent comme des ombres chinoises. Sur les conseils de mon ami, j’emprunte un petit chemin qui s’enfonce dans un bosquet obscur que j’éclaire avec mon téléphone. Franchi l’orée, j’arrive sur un champ qui surplombe la vallée. Spectateur privilégié j’assiste à la magie de l’aube où le soleil encore planqué derrière les collines commence à peindre de mille feux l’horizon et révèle le damier laissé par les chemtrails comme autant de scarifications dans le ciel. Tableau fantastique aux impressions chaque jour différentes. Les pieds plantés dans la Terre de Chalosse, je reste contemplatif et dans mon for intérieur je me dis que ce spectacle est une parfaite introduction pour présenter l’album A Farewell to Dawn de 7 weeks. L’aube est souvent porteuse d’espoir avec une nouvelle journée qui se présente à nous. Pourtant, 7 weeks nous présente plutôt son côté obscur avec A Farewell to Dawn. En effet, loin de la flamboyance solaire l’album se retranche dans le clair-obscur et les tourments de l’âme.

Je ne sais pas s’il y a quelque chose de pourri au royaume de Danemark. Cependant, l’album s’ouvre sur un « King in the Mud » tragique et fataliste où le roi se meure. Enlisé dans la boue, sous une pluie battante et forcément loin des lumières, l’issue semble funeste. Une ambiance lourde qui s’imprègne parfaitement à la musique avec un riff musclé et hypnotique. Nous retrouvons une ambiance influencée par l’expérience Dead of Night sur « The Ghost Beside Me ». Un titre schizophrénique, limite paranoïaque et surtout très tourmenté aux guitares abrasives. Ça sent l’HP. Quand j’écris cela, je ne parle pas de l’odeur d’une sauce anglaise très appréciée durant le breakfast. L’instrumental « Ohka » qui signifie fleur de cerisier est le joli nom donné par les japonais pour désigner le Yokosuka MXY-7. Un bel engin volant aux qualités explosives puisqu’il s’agit d’un avion suicide. Un peuple raffiné et poétique, n’est-ce pas ? Les dialogues et l’ambiance instrumentale d’« Ohka » s’inscrivent dans la veine de Dead of Night pour annoncer le percutant « Kamikazes ». Un titre puissant et solaire qui décrit avec justesse ce moment remplit de doute juste avant le crash fatal, insensé et funeste. Sur un rythme incisif nous sommes pourchassés par les « Broken Voices ». Un mal sournois qui nous pousse à fuir et tout abandonner. Pas de fifres mais un tambour battant. Jeremy Cantin-Gaucher, sur « A Farewell to Dawn », guide la troupe dans une marche sombre et forcément guerrière qui annonce un « January » à l’ambiance glacée. En toute cohérence avec l’introduction instrumental, « January » se clôture sur ces mots « You think you walk for freedom ? You march towards War. ». Si Josh Homme regrette qu’il soit si difficile de confier un secret en toute discrétion sur le célèbre « The Lost Art of Keeping a Secret », Julien Bernard sur « A Well Kept Secret » montre que certains secrets masquent et camouflent la vérité. J’entends déjà sourdre les critiques de copie ou de plagiat. Mais seuls les bons musiciens peuvent se permettre ce genre d’incartade sans tomber dans la pantomime grotesque ou l’ersatz bas-de-gamme. Oui, ça sonne comme du Queen of the Stone Age, mais ça sonne terriblement bien ! Pour 7 weeks les compromis sont des nœuds et lorsque les fibres torturées par la tension finissent par lâcher, cela libère l’énergie de la frustration. Nous la retrouvons dans un « Knots » plus speedé, hargneux et rentre dedans.

Après plusieurs albums et changement de musiciens, A Farewell To Dawn a été composé par le noyau dur à l’origine de 7 weeks : Julien Bernard et Jérémy Cantin-Gauchet. Nous retrouvons l’influence indéniable de l’expérience de Dead of Night avec un style toujours très Rock mais plus personnel et introspectif. A Farewell to Dawn est un album cohérent aux compositions tourmentées. Coincé dans la pénombre, la renaissance se fera en lumière.

Vincent GILOT aka Le Guise
20 Novembre 2017