Lille offre une quantité de cafés-concerts avec une programmation assez éclectique. En 2006, mes amis du groupe Egon jouaient à La Rumeur – un troquet vers Lille Sud avec une cave aménagée pour les concerts – en première partie de Versari. Mais Versari kezako ? La lecture du fly résolut mon énigme rapidos. Hum, un sacré pedigree : ex-Sloy, ex-Hurleur… Parfois, il arrive que des « ex » vous évoquent de bons souvenirs.
Jean-Charles Versari, Cyril Bilbeaud et Jason Glasser accompagnés sur scène par Laureline Prod’homme à la basse, offrirent un concert très sympathique dans une ambiance rock feutrée, dont l’essentiel des chansons jouées ce soir là, figurent sur Jour après jour. Entre temps, j’ai revu Jean-Charles en concert privé dans un appartement du coeur de Lille. Une soirée très intimiste et… éthylique aussi.
Pourquoi ai-je attendu juillet 2008 pour chroniquer un album sorti depuis janvier 2007 ? Ouais c’est vrai çà ! Pourquoi ? Car j’écoute régulièrement Jour après jour avec beaucoup de plaisir. Un disque qui à longueur d’écoute se dévoile toujours un peu plus et que je n’hésite jamais à recommander. Toujours à portée de main, ses notes ornent admirablement l’appartement, quand elles ne m’accompagnent pas sur les routes. Alors, je repousse à un peu plus tard l’écriture afin de ne pas me reprocher de m’être emballé … Fini, de tourner timidement autour de la piscine, en glissant furtivement un orteil pour prendre la température. Je me jette à l’eau.
Quoi de mieux qu’un voyage en avion et la reprise de « Atmosphere » de Joy Division pour ouvrir et fermer un album au Rock justement atmosphérique ! En effet, à l’écoute des chansons de ce premier album de Versari, je me sens comme vautré dans un gros nuage Pop-Rock cotonneux. Un opus qui, même si bizarrement des titres sont en anglais fait honneur au Rock chanté en français. Les instruments entre guitares stridentes, Theremin discret, trompettes plaintives, décrivent adroitement les émotions transmissent par les paroles comme « Dans un rêve / dans un cauchemar » et l’admirable « Les lignes blanches ». Versari nous narre avec beaucoup de pudeur, avec la maturité de son regard, des saynètes de la vie quotidienne où nos destins se croisent pour le meilleur comme pour le pire. Le réveil de ce couple dans « Les amours quotidiens ». Une fusion musicale entre « Comme d’habitude » et « Il est cinq heures, Paris s’éveille ». Une chanson réaliste très poétique et une agréable invitation … à rester au pieu ! Nous assistons impuissants au couple qui se déchire sur « Les lignes blanches » avec son refrain annonciateur « Tous tes baisers, tout est baisé » ? Une admirable chanson en road-movie où l’ambiance lourde et fantomatique me projette des images du film Indian runner de Sean Penn. Un panel de chansons pleines de mélancolie comme « Le retour » ou « Sweet ». Mais, Versari reste un groupe de rock. « Blunt » peut s’enorgueillir de porter le titre du morceau Rock de l’album. Vous savez ce Rock qui vous fait balancer l’arrière train. Un regard amer et pas franchement optimiste sur notre société qui part en couille avec la désinformation des média et les magouilles politiques. La chanson du désabusé ! L’album se clôture sur la magnifique reprise de « Atmosphere » de Joy Division où le violoncelle de Jason et la douceur du Theremin nous emmènent vers la quiétude.
Jour après jour se découvre comme un joyau fragile dans un écrin feutré. Nous retrouvons à la production Ian Caple qui a collaboré entre autre avec Tindersticks, Alain Bashung, Tricky ou Yann Tiersen. Il camoufle des chansons finement ciselées. Un album à écouter Jour après jour tranquillement Blottie près de la douceur de l’âtre avec un Talisker.
Vincent GILOT aka Le Guise
14 juillet 2008